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LES VACANCES.

n’avais plus peur. Je sentais l’empire que prenait sur eux cet homme si fort, si courageux, si résolu. Les sauvages se tenaient immobiles, le regardant avec curiosité et respect. Me tenant toujours par la main, il avança vers eux, leur fit signe avec sa hache de s’écarter pour nous laisser passer. Ils se retirèrent avec un effroi comique. « Suivez-moi ! » leur dit-il de sa voix de commandement, et il marcha, suivi de tous ces sauvages, jusqu’à ce qu’il fût sorti du bois. Là, il regarda autour de lui, et, ne voyant pas le Normand, il cria : « Mon brave Normand, nous sommes découverts. Montre-toi et viens à moi, car ton bras peut m’être utile. » Aucune réponse ne se fit entendre ; mais quelques minutes après je vis le Normand sortir du bois. Il regarda les sauvages, et dit au commandant : « Mon commandant, je n’ai pas répondu, parce que j’étais à plat ventre dans les herbes, et je ne voulais pas que ces peaux rouges pussent croire que je me cachais. Je suis rentré dans le bois en rampant. J’ai commencé mon évolution dès que j’ai entendu votre arrière retentissant.

— Crois-tu que ce soient des mangeurs d’hommes ?

— Pour ça non, mon commandant ; ils n’en ont pas la mine ; je n’en ai jamais vu de