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LES VACANCES.

la chaloupe s’est éloignée et puis quand elle s’est enfoncée dans la vague. Un autre souvenir qui m’est revenu aussi depuis que j’ai vu le Normand, c’est la mort de papa et la scène de la veille. C’est singulier qu’on puisse si bien oublier pendant des années ce dont on se souvient si clairement après. »

Le récit de Sophie avait été long ; on s’étonnait au salon de leur absence. M. de Rugès avait profité de ce temps pour préparer Mme de Rosbourg à revoir Lecomte et à accueillir l’espoir du retour du commandant de Rosbourg, retour presque miraculeux, sans doute, mais enfin possible, comme celui de Lecomte. Après deux heures de larmes et d’agitation, entremêlées d’espérance et de bonheur, elle pria M. de Rugès de lui amener le lendemain le Normand dans son salon particulier ; elle voulait le voir, seule, lui parler sans témoins. Quand les enfants rentrèrent, elle vit qu’ils avaient tous pleuré, elle appela Marguerite, la serra contre son cœur et lui dit :

« Tu sais ?… tu sais que ton cher papa peut revenir encore ? Viens avec moi, mon enfant ; viens à l’église prier Dieu pour ton père et lui demander de nous le rendre.

SOPHIE

Me permettez-vous de vous accompagner, ma-