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quents et si prononcés que le général s’éveilla.

« Quoi ? qu’est-ce ? dit-il. Pourquoi empêche-t-on cet enfant de parler ? Pourquoi l’empêche-t-on de remuer ?

Madame Dérigny

Vous dormiez, général ; j’avais peur qu’il ne vous éveillât.

Le général

Et quand je me serais éveillé, quel mal aurais-je ressenti ? On me prend donc pour un tigre, pour un ogre ? J’ai beau me faire doux comme un agneau, vous êtes tous frémissants et tremblants. Craindre quoi ? Suis-je un monstre, un diable ? »

Mme Dérigny regarda en souriant le général, dont les yeux brillaient d’une colère mal contenue :

Madame Dérigny

Mon bon général, il est bien juste que nous vous tourmentions le moins possible, que nous respections votre sommeil.

Le général

Laissez donc ! je ne veux pas de tout cela, moi. Jacques, pourquoi empêchais-tu ton frère de parler ?

Jacques

Général, parce que j’avais peur que vous ne vous missiez en colère. Paul est petit, il a peur quand vous vous fâchez ; il oublie alors que vous êtes bon ; et, comme en voiture il ne peut pas se sauver ou se cacher, il me fait trop pitié. »

Le général devenait fort rouge ; ses veines se gonflaient, ses yeux brillaient ; Mme Dérigny s’at-