Page:Ségur - La soeur de Gribouille, Hachette, 1886.djvu/374

Cette page a été validée par deux contributeurs.

repose près de moi et me soutient ; il m’obtiendra du bon Dieu le courage de supporter la séparation. Ayez confiance en moi, mon ami ; ne suis-je pas habituée à me résigner ?

le brigadier.

Venez, chère enfant, venez ; allons embrasser une dernière fois notre frère. »

Le brigadier la ramena dans la chambre où le curé priait pour l’âme qui venait de rentrer dans le sein de Dieu. M. Delmis avait quitté la maison. Caroline marcha d’un pas ferme vers le lit, se pencha sur le visage souriant de son frère, déposa sur son front et sur ses joues décolorées plusieurs tendres baisers, pria quelques instants agenouillée près de lui, et se releva au moment où le brigadier commençait à s’inquiéter de son immobilité.

« Partons, dit-elle, le visage baigné de larmes, mais calme et résignée. Monsieur le curé, je suis prête à me rendre chez vous ; seulement, dites-moi qui restera près de mon frère ?

— Ce sera moi, dit le brigadier.

— Ce sera Nanon, qui en a l’habitude, dit le curé ; si on a besoin de votre aide, on vous appellera, brigadier. »

Le brigadier accompagna le curé et Caroline jusqu’à la porte, les suivit longtemps des yeux et revint près du lit de Gribouille ; il le baisa au front.

« Adieu, pauvre enfant, pauvre frère, dit-il en le contemplant ; tu m’as aimé pendant ta vie, tu m’as plus aimé encore à la mort, puisque, après