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apprit au maire l’événement terrible de la nuit et le désir de Gribouille, M. Delmis se hâta de suivre le brigadier. Gribouille vivait et parlait encore, mais sa respiration devenait plus précipitée, sa parole plus lente, sa voix plus faible. Il reconnut M. Delmis.

« Merci, monsieur,… merci… d’être venu… Je vous aimais,… je vous ai… souvent… impatienté ;… pardon,… pardon… Demandez… à madame… qu’elle me pardonne… Donnez-moi… votre main… en signe… de pardon. »

M. Delmis, trop ému pour répondre, lui tendit la main sans parler ; Gribouille la porta à ses lèvres, la baisa à plusieurs reprises puis il prit celles de Caroline et du brigadier, qu’il réunit dans les siennes et qu’il baisa également.

« À présent,… c’est fini,… dit-il d’une voix haletante ; le bon Dieu !… mettez sur mes lèvres… le crucifix… de maman… C’est bien… Adieu,… à revoir,… Caroline,… mon frère,… monsieur le curé,… monsieur Delmis… Jésus !… Seigneur !… Je viens… maman… je viens !… »

Gribouille poussa un soupir, serra convulsivement le crucifix contre son cœur et rendit à Dieu son âme innocente… Tous étaient restés à genoux près du lit du pauvre agonisant ; quelques minutes se passèrent pendant lesquelles on n’entendit que les sanglots de Caroline et les prières du curé, auxquelles se joignirent M. Delmis et le brigadier. Le curé se releva, regarda avec attendrissement le