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Caroline ; si je ne l’embrassais pas ce soir, j’aurais comme un remords qui m’étoufferait.

le curé.

Quel enfantillage ! Tu oublies que tu as seize ans et que tu deviens un homme.

gribouille.

Est-ce une raison pour oublier ma sœur ? Croyez-vous que je n’embrasserai plus ma sœur et que je la laisserai là, quand je serai un homme, comme vous dites ? Le brigadier m’a promis de m’accompagner, parce qu’il ne veut pas me laisser aller seul la nuit. Je ne serai pas longtemps, allez : vous causerez plus tard.

le curé.

À demain, alors, brigadier, car plus tard je serai à mon poste, à la prison, près du corps de la pauvre Rose. »

Le brigadier serra la main du curé en lui exprimant le regret de ne pas pouvoir lui tenir compagnie, et partit avec Gribouille. Quand ils arrivèrent au presbytère, le brigadier voulut rester à la porte et fit entrer Gribouille seul. Celui-ci ne tarda pas à revenir : il avait les yeux rouges. Le brigadier s’en aperçut.

« Qu’as-tu, mon pauvre garçon ? On dirait que tu as pleuré.

gribouille.

Oui, je n’ai pas pu m’en empêcher en disant adieu à Caroline ; il me semblait que je lui disais adieu pour bien longtemps ; je suis triste ce soir :