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Jean arriva en effet ; il apportait de quoi mettre le couvert… un seul couvert !

Kersac s’en aperçut.

Kersac.

Jean, qu’est-ce que c’est que ça ?

Jean.

Quoi donc, monsieur ?

Kersac.

Un seul couvert ? Pourquoi un seul ?

Jean.

Parce qu’il n’y a que vous, monsieur, qui n’ayez pas dîné.

Kersac.

Et toi tu n’as pas soupé… Jean, écoute-moi et regarde-moi bien en face. Tu as raison et j’ai tort. Tu m’as fait la leçon, et tu as bien fait, et je t’en remercie. Demande trois couverts et va chercher ton Jeannot. »

Jean le regardait, il ne pouvait en croire ses oreilles. Il s’approcha tout près de lui. Son air étonné et joyeux fit sourire Kersac.

Kersac.

Tu ne vas pas te moquer de moi, d’avoir bien fait ?

Jean.

Me moquer de vous ? moi, monsieur ? Rire de vous au moment où vous agissez comme Notre Seigneur ? au moment où je vous admire, où je vous aime ? Oh ! monsieur ! »

Jean saisit la main de Kersac et la baisa ; Kersac prit la tête de Jean dans ses mains et le baisa au front.