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resplendissants. M. Abel et ses décorations attiraient tous les regards.

La cérémonie ne fut pas trop longue ; à la sacristie, on se complimenta, on s’embrassa ; M. Abel eut à subir les éloges les plus exaltés, les plus crus ; un autre en eût été embarrassé ; M. Abel riait de tout, avait réponse à tout. Kersac, un peu lourd, un peu mastoc, était mal à l’aise ; seul au milieu de ce monde qui se connaissait, qui se sentait en famille, il eût voulu s’esquiver ; plusieurs fois il chercha à se couler hors de la sacristie, mais toujours la foule lui barrait le passage ; enfin il passa et disparut.

Lorsqu’il fut temps de partir, Abel chercha vainement Kersac ; ni les recherches dans l’intérieur de l’église, ni les appels réitérés au dehors ne le ramenèrent près de M. Abel.

Les mariés étaient partis ; les invités se pressaient d’arriver chez les Amédée pour prendre leur part du déjeuner ; M. Abel, accompagné de Jean, continuait à chercher sa voiture et Kersac.

M. Abel.

Il sera parti sans nous attendre.

Jean.

Je ne le pense pas, monsieur ; d’ailleurs votre cocher n’y aura pas consenti.

M. Abel.

Je ne sais que croire, en vérité ; le plus clair de l’affaire, c’est que nous n’avons ni Kersac ni voiture ; viens avec moi, nous irons à pied, malgré notre tenue de bal. Il n’y a pas loin, heureusement. »