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qui ne suis bon à rien, qui ne puis et ne pourrai jamais rien pour lui, il m’aime, monsieur ; oui, il m’aime, il a la bonté de m’aimer ; il est content que je l’aime. Bon, excellent M. Abel ! Si je pouvais du moins lui faire comprendre ce que j’ai pour lui dans le cœur !… Mais je ne peux pas ; je ne trouve pas les paroles qu’il faut ; et puis, je n’ose pas. »

Barcuss était de plus en plus content de ce que lui disait Jean ; lorsque Jean fut parti, Barcuss alla raconter à Mme de Grignan toutes les paroles que lui avait dites le protégé de M. Abel ; elle en fut touchée et les redit à son tour à Abel.

Abel.

En vous le donnant, chère dame, je savais le trésor que je vous livrais ; si je ne l’avais pas fait entrer chez vous, personne que moi ne l’aurait eu. Ce sont de ces âmes d’élite qu’on garde soigneusement quand Dieu les met sur votre chemin. Barcuss et lui sont dignes de s’entendre.

Madame de Grignan.

Ils s’entendent déjà comme de vieux amis. Barcuss est enchanté ; il vous attend au passage pour vous remercier. »

En effet, lorsque M. Abel partit à la fin de la journée pour rentrer chez lui, Barcuss le guettait au passage.

« Monsieur, je ne vous remercierai jamais assez du cadeau que vous avez fait à notre maison. Ce Jean me paraît être un vrai trésor. Et comme il vous aime ! Si vous aviez vu ses yeux quand il me