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Jean s’approcha et se mit à genoux près du lit du pauvre petit malade.

Roger.

Je suis content de vous voir, Jean ; je sens que je vous aimerai, que vous êtes un enfant du bon Dieu comme moi. »

Jean lui baisa la main et ne put retenir une larme ; il restait à genoux près du lit et le regardait.

Roger.

Est-ce pour moi que vous êtes triste, Jean ? Je ne suis pas malheureux. Je sais que je vais mourir, mais ce n’est pas un malheur de mourir. Je souffre tant ! et depuis si longtemps ! Je serai près du bon Dieu, près de la bonne sainte Vierge ; papa, maman et ma sœur me rejoindront ; et toi aussi, Jean. Je t’aime déjà un peu… Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! je souffre ! Tant mieux, mon Dieu, c’est pour vous !… Je souffre ! Donnez-moi du courage, mon Dieu ! Aidez-moi… Oh ! mon Dieu ! »

Sa tête retomba sur l’oreiller ; des gémissements contenus s’échappaient de sa poitrine ; une sueur froide inondait son visage. M. et Mme de Grignan avaient pris la place de Jean et d’Abel ; ils lui essuyaient la sueur qui ruisselait sur son visage et sur son cou, et lui faisaient respirer du vinaigre.

Quand la crise fut calmée, Roger parut inquiet.

« Maman, dit-il d’une voix éteinte, je crains de m’être plaint trop vivement ; croyez-vous que j’aie offensé le bon Dieu ?

Madame de Grignan.

Non, mon enfant, mon cher enfant ; tu as tout