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M. Dormère.

Ah ! c’est lui qu’on appelait Rame ! Je me souviens que mon frère m’en a parlé souvent. Et où allez-vous, mon ami ? Vous êtes marin, à ce que je vois.

Rame.

Moi plus marin, Moussu ; moi aller nulle part ; moi rester ici.

M. Dormère.

Comment ! rester ici ? Chez qui donc ?

Le nègre.

Chez petite maîtresse, mam’selle Geneviève.

M. Dormère.

Mais Geneviève n’est pas chez elle ; elle est chez moi.

Le nègre.

Ça fait rien, Moussu. Moi rester chez vous.

M. Dormère.

Si cela me convient. J’ai assez de domestiques, mon cher ; je n’ai pas d’ouvrage pour vous.

Le nègre, effrayé.

Oh ! Moussu. Moi faire tout quoi ordonnera moussu. Moi pas demander argent, pas demander chambre, moi demander rien ; seulement moi servir petite maîtresse. Moi manger pain sec, boire l’eau, coucher dehors sur la terre et moi être heureux avec petite maîtresse ; moi tant aimer petite maîtresse, si douce, si bonne pour son pauvre Rame. »

Le pauvre nègre avait l’air si suppliant, si humble, que M. Dormère fut un peu touché de ce