Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

possession du Mexique (1519-1527) et du Pérou (1532-1541). Au moment de la conquête brutale, les conquistadores pillèrent sans vergogne les trésors accumulés par les Indiens ; rien que le trésor des Incas rapporta des millions à Pizarro et à ses compagnons. Puis, ce furent les tributs exigés des indigènes par les Espagnols, qui prirent possession du pays. Enfin, les mines rapportèrent des revenus réguliers. La découverte de la mine d’argent de Potosi, en 1545, accrut. encore singulièrement la quantité des métaux précieux, car elle rend 300 000 kg. par an. Le Mexique, la Nouvelle-Grenade, le Pérou, et, dans une plus faible mesure, le Chili déversèrent des flots de métaux précieux. En un siècle, la production de ces métaux s’accrut énormément, surtout celle de l’argent, qui a presque quintuplé de 1520 à 1620. Maintenant, les quatre cinquièmes de l’or et de l’argent proviennent de l’Amérique espagnole[1].

L’Espagne aurait donc dû recueillir toutes ces richesses. Elle essaya bien, en effet, de s’en réserver le monopole, mais elle n’y parvint pas, car les phénomènes économiques étaient plus forts que toutes les lois et les institutions. En réalité, les autres puissances maritimes profitèrent plus de ces trésors que la métropole des colonies espagnoles, et son système colonial contribua à la ruiner.

4. Le système colonial de l’Espagne. — Voyons donc tout d’abord comment la monarchie espagnole prétendit régler le commerce de l’Amérique. Elle essaya non seulement de se réserver tout ce commerce, mais aussi, afin de le contrôler plus aisément, de le concentrer dans un

  1. La production de l’or ne s’est accrue qu’assez faiblement (d’environ un sixième). Cf. Soetbeer, Matériaux pour faciliter l’intelligence et l’examen des rapports économiques des métaux précieux et de la question monétaire, trad. Ringeisen, 1889. N’oublions pas que l’exactitude de toutes ces évaluations est sujette à caution.