Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

(ceux qu’on appelle les marans). Les Espagnols ont imité leurs devanciers immédiats.


2. Les Portugais et les Espagnols à Anvers. — On s’explique ainsi la grande place que tiennent à Anvers les colonies portugaises et espagnoles, tout au moins jusque vers 1560 ; leurs vaisseaux entrent en grand nombre dans le port de l’Escaut. Anvers se trouve être la grande place d’étape entre les puissances maritimes, qui disposent à ce moment-là de toutes les productions de l’Asie et du Nouveau-Monde, et les pays du Nord-Ouest et du Nord de l’Europe. C’est aussi par Anvers que se transportent, à destination de la péninsule hispanique et du Nouveau-Monde, les produits si riches de l’industrie des Pays-Bas : draperie, toiles, tapisseries, objets de piété, œuvres d’art. Toutefois, si importante que soit cette place d’Anvers, la plus considérable que l’on ait connue jusqu’alors, elle paraîtrait bien insignifiante si on la comparait au mouvement commercial des temps présents : le tonnage des navires dépasse rarement 200 tonneaux ; s’il est des caravelles de 300 à 500 tonneaux, on se sert de préférence, pour le commerce du Sud, de hulques légères et résistantes, qui n’ont pas plus de 110 tonneaux. Le mouvement du port, énorme pour l’époque, paraîtrait très faible aujourd’hui : en l’année 1542, on n’a compté que 36 départs pour l’Espagne.

Il n’en est pas moins vrai qu’en 1545, comme le montre M. Goris d’après les taxes d’impôts, le port d’Anvers a exporté des marchandises pour une valeur de près de 6 millions de livres, — chiffre très considérable pour l’époque —, tandis que le reste des Pays-Bas n’en a exporté que pour 2 millions[1]. On peut bien dire, selon l’expression de M. Pirenne, que « les Pays-Bas

  1. A. Goris, ouv. cité, pp. 317-336.