Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/199

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

paru ; l’artisan, le travailleur et surtout l’ouvrière en chambre subsistent toujours, principalement dans les dernières opérations de finissage (confection, ajustage, etc.)[1]. Mais combien y a-t-il de contrées où le capitalisme n’en est encore qu’à ses débuts et n’exerce vraiment son action que du dehors ! Puis, n’oublions pas que, partout, l’agriculture échappe encore, pour une très forte part, à l’emprise du capitalisme. Elle a pu subir, de longue date, son influence indirecte, mais fixée au sol, c’est-à-dire à l’élément stable par excellence, elle n’est, même aujourd’hui, touchée par lui que dans la mesure où. elle doit compter avec les spéculations commerciales ou avec le crédit sous toutes ses formes. D’ailleurs, ce caractère « conservateur » de l’agriculture est surtout le fait de la vieille Europe ; dans les pays neufs, comme les États-Unis, les entreprises agricoles affectent davantage le caractère capitaliste ; le type du fermier-homme d’affaires (business farmer) s’y répand de plus en plus[2].

Au cours des temps modernes, le capitalisme a gagné peu à peu en profondeur. Mais, depuis la fin du XVIIIe siècle, son ère géographique n’a cessé aussi de s’étendre. Il arrive un moment où il gagne le Nouveau-Monde. À cet égard, la rupture du « pacte colonial » a une portée immense. On a vu que le système colonial avait puissamment contribué à l’éclosion du capitalisme. Par un retour des choses, le développement même du capitalisme devait avoir pour effet de ruiner le monopole des métropoles, qui devenait une entrave de plus en plus gênante à toute l’expansion économique. La chute du système colonial est donc en liaison directe avec l’avènement du capitalisme industriel.

  1. Voy. M. ANSIAUX, Traité d’économie politique, t. I, Paris, 1921.
  2. Voy. S. N. B. Gras, ouv. cit.