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La Révolution a eu précisément pour effet de détruire, les distinctions juridiques qui existaient entre les classes, d’établir entre ions les citoyens l’égalité de droits. En1789, c’était tout le Tiers État qui s’était levé pour réclamer l’abolition des privilèges de l’aristocratie, l’admission de tous à tous les emplois, l’anéantissement du régime seigneurial.

Nul doute que le développement économique, qui se manifestait à cette époque, la première poussée du capitalisme n’aient grandement contribué à la transformation sociale qui s’opère aux approches de 1789 ; la classe des négociants, des hommes d’affaire a pris une part active aux événements révolutionnaires ; on commence à s’en rendre compte, et de nouvelles études achèveront de mettre en lumière ce fait si important[1].

Il convient de remarquer que, tant que les classes sociales se distinguent surtout par leurs caractères juridiques, les individu-, qui les composent n’ont qu’une notion assez confuse de la classe sociale à laquelle ils appartiennent respectivement. Voici, par exemple, la noblesse sous l’ancien régime. Nous voyons qu’elle comprend bien des catégories distinctes, en ce qui concerne non seulement la condition de fortune et le mode de vie, mais aussi les privilèges ; il existe de grandes différences entre la noblesse de cour et les gentilshommes campagnards, entre la noblesse d’épée et la noblesse de robe[2]. Les nobles ont bien conscience d’appartenir à une caste privilégiée, par rapport aux non-nobles, mais ils songent surtout aux privilèges particuliers de la

  1. Voy. Ph. Pagnac, La législation civile de la Révolution française, 1898 ; Ch. Ballot, L’introduction du machinisme dans l’industrie française, 1923 ; Jean Jaurès, La Constituante (Histoire socialiste) ; A. Mathiez, La Révolution (Coll. Armand Colin), t. I.
  2. Voy. Henri Carré, La noblesse de France et l’opinion publique au XVIIIe siècle, Paris, 1921.