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Ce tableau met aussi en lumière la grande importance du commerce avec les Indes Occidentales. Les colonies ont des rapports de plus en plus considérables avec les Antilles françaises, où elles trouvent le sucre et les mélasses à meilleur marché. On s’explique alors que les planteurs des Antilles anglaises aient obtenu du Parlement le Sugar Act, de 1733, qui établit des droits de 9 pence par gallon sur le rhum, 6 sur les mélasses et 5 sh. par cent livres sur le sucre importé.

Cet Act, s’il avait été observé, aurait causé un grand préjudice aux colons ; mais il resta lettre morte. Le commerce avec les Antilles françaises continua comme par le passé ; il ne fut même pas interrompu par la Guerre de Sept Ans. En effet, on se servait pour ce trafic de ports neutres, hollandais ou espagnols ; en 1759, Monte Christi, port espagnol de la côte nord de Saint-Domingue, reçoit plus de cent vaisseaux de l’Amérique du Nord.

Le Sugar Act de 1764 semblait devoir être plus efficace : il interdisait l’importation du rhum des colonies étrangères, portait à 1 1. 7 sh. le droit de 5 sh. sur le sucre, tout en réduisant de 6 pence à 3 par gallon le droit sur les mélasses (transformé, deux ans après, en un droit d’un penny, quelle que fût la provenance). Mais la contrebande rendit, en fait, inefficace ce nouveau Sugar Act.

Ce qui donnait une si grande importance au commerce avec les Antilles, c’est qu’il était lié à la traite négrière : pour l’achat des mélasses, les distillateurs de la Nouvelle-Angleterre avaient recours au trafic des nègres. Grâce à l’asiento, de 1713 à 1733, on transporta 15 000 nègres par an, et les deux tiers en étaient réservés aux colonies anglaises. Le nombre des nègres s’éleva donc rapidement, de 59 000 en 1714, à 193 000 en 1754, et à 697 000, en 1790. Il se faisait aussi aux Antilles un grand com-