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LES MUSES FRANÇAISES

Du bois sèche. La vigne, au ras du mur, fleurit.
Autour d’un caillou rond tremblote l’herbe mince.
Le vent souffle. Un lambeau s’envole. Un arbre grince.
Dans le seau noir un peu d’eau vaseuse a tari.

La fenêtre est ouverte ; au fond, le feu bleuit ;
Les verres du repas sont sur la table épaisse ;
Le plat fume, un enfant s’assied, quelqu’un se baisse.
— Révérons simplement la bonté d’aujourd’hui.


RESTE ICI


Reste ici, j’ai besoin de m’ expliquer mon âme,
Et la cherchant, j’ai peur du silence irréel
Qui, plein des fleuves morts endormis dans sa trame,
L’absorbe et la dissout ainsi qu’un peu de sel.

Pour m’aider, tu feindras que cela t’intéresse,
Ma vie étroite où peu de chose s’emmêla.
— Un peu de bien, de mal, de gaîté, de tendresse
Et mon étonnement de n’être que cela !

Ton rêve curieux voudra que je m’applique ;
Alors, mieux attentive aux petites clartés,
Je tâcherai de tordre en une tige unique
Les fils disjoints et fous de mes complexités.

C’est afin seulement qu’un autre nous comprenne
Que l’on peut le sincère et le vivant effort.
— Reste ici, puisqu’il faut que mon âme lointaine
Pour m’être proche un peu, te soit proche d’abord.


UN PEU DE PLUIE...


Un peu de pluie, un peu d’ombre, un peu de tristesse,
Crépuscule. Des murs, des toits, des voix, des pas.
De tous les livres lus comme nous sommes las !
Comme l’hiver mauvais nous tient et nous oppresse !