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LES MUSES FRANÇAISES

V

Las ! que me sert que si parfaitement
Louas[1] jadis et ma tresse dorée.
Et de mes yeux la beauté comparée
À deux soleils, dont Amour finement

Tira les traits causes de ton tourment ?
Où êtes-vous pleurs de peu de durée ?
Ô mort, par qui devais être honorée !
Ta ferme amour ! ô itéré[2] serment !

Doncque c’était le but de ta malice
De m’asservir sous ombre de service !
Pardonne-moi, ami, à cette fois.

Étant outrée et de dépit et d’ire[3] ;
Mais je m’assure, quelque part que tu sois.
Qu’autant que moi tu souffres le martyre.


VI

Baise m’encor, rebaise-moi et baise ;
Donne m’en un de tes plus savoureux,
Donne m’en un de tes plus amoureux :
Je t’en rendrai quatre plus chauds que braise.

Las ! Te plains-tu ? Ça que ce mal j’apaise
En te donnant dix autres doucereux,
Ainsi mêlant nos baisers tant heureux
Jouissons-nous l’un de l’autre à notre aise.

Lors double vie à chacun en suivra
Chacun en soi et son ami vivra.
Permets m’Amour penser quelque folie.

Toujours suis mal, vivant discrètement,
Et ne me puis donner contentement,
Si hors de moi ne fais quelque saillie.

  1. Tu louas et comparas.
  2. Répété.
  3. Colère.