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DIZAIN


Je te promis au soir que pour ce jour
Je m’en irais, à ton instance grande,
Faire chez toi quelque peu de séjour :
Mais je ne puis : par quoi me recommande,
Te promettant m’acquitter pour l’amende,
Non d’un seul jour mais de toute ma vie,
Ayant toujours de te complaire envie.
Donc te supplie accepter le vouloir
De qui tu as la pensée ravie[1]
Par tes vertus, ta grâce et ton savoir.


ÉGLOGUE


Combien de fois ai-je en moi souhaité
Me rencontrer sur la chaleur d’été
Tout au plus près de la claire fontaine.
Où mon désir avec cil[2] se promène.
Qui exercite en sa philosophie
Son gent esprit, duquel tant je me fie
Que ne craindrais, sans aucune maignie[3],
De me trouver seule en sa compagnie :
Que dis-je seule ? Aires[4] bien accompagnée
D’honnêteté, que vertu a gagnée
À Apollo, Muses et Nymphes maintes
Ne s’adonnant qu’à toutes œuvres saintes.
Là, quand j’aurais bien au long vu son cours
Je le lairrais[5] faire à part ses discours :
Puis peu à peu de lui m’écarterais,
Et toute nue en l’eau me jetterais.
Mais je voudrais lors quant et quant[6] avoir
Mon petit luth accordé au devoir,
Duquel ayant connu, et pris le son,
J’entonnerais sur lui une chanson.
Pour un peu voir quels gestes il tiendrait
Mais si vers moi il s’en venait tout droit,
Je le lairrais hardiment approcher :

  1. Inversion pour l’accord du participe.
  2. Celui-ci.
  3. Suite, serviteur.
  4. Mais bien plutôt.
  5. Laisserais.
  6. En même temps.