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LES MUSES FRANÇAISES

Ne lui dis plus, ni lui à moi ». —
« Le reçut-il avecque émoi ?
S’il n’est ainsi malheur à moi ! » —
Il lui a dit : « Ma foi, ne sais ;
Mais, oyez bien ce que dirai :
S’il ne vous eût voulu grand bien,
Il n’eût de vous accepté rien ».
Elle répond : « C’est se moquer !
Je sais bien que point ne me hait
Jamais ne lui fis autre tort
Que de l’aimer moult et très fort ;
Si pour cela me veut haïr,
Lors, il est digne de mourir.
Jamais par toi, ni par autrui,
D’ici que je parle à lui,
Je ne lui veux rien demander.
Car moi-même lui veux montrer
Comment m’a étreinte l’amour.
Mais ne sais s’il fera séjour ».
Le chambellan a répondu :
« Dame, le Roi l’a retenu
Pendant un an, avec serment
De le servir loyalement.
Ainsi, pourrez avec loisir
Lui montrer tout votre désir. »
Lors de le savoir demeurant.
S’en réjouit moult durement.


De son côté, le chevalier est fort troublé. Il sent son cœur battre d’un jeune amour pour la princesse, et cependant il ne voudrait pas trahir le serment qu’il fit à sa femme.

Il se rend néanmoins auprès du roi avec l’espoir de rencontrer Guilliadon. Justement le monarque se trouvait dans l’appartement de sa fille, en train de jouer aux échecs. C’est là qu’il reçoit Eliduc dont il vante la vaillance à sa fille. La jeune « damoiselle » fait venir près d’elle le héros.

Loin des autres se sont assis,
Tous deux étaient d’amour épris.
L’entretenir elle n’osait
Et lui de parler il craignait.

Il la remercie cependant de son cadeau. Alors Guilliadon ne peut lui cacher son amour et elle demande à Eliduc de lui faire connaître sa pensée :