Page:Séché - Les Muses françaises, I, 1908.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.
18
LES MUSES FRANÇAISES

Mais cependant il est parti.
À son hôtel s’en est allé,
Tout morne et très préoccupé,
Et pour la belle plein d’effroi, —
La fille de son seigneur le Roi
Qui tant doucement lui parla
Et de ce qu’elle soupira.
Il croit devoir se reprocher»
De tant être au pays resté
Sans qu’il l’eût vue plus souvent.
De cette idée, il se repent,
De sa femme il a remembrance
À qui il a fait l’assurance
Que bonne foi, lui garderait,
Et loyalement se tiendrait.

Cependant la jeune fille séduite par la mâle prestance du chevalier, brûle d’en faire son ami. Elle ne peut dormir de la nuit, et le matin venu elle expose son désir à son chambellan :

« J’aime le nouveau soudoyer,
Eliduc, le bon chevalier ;
Ne puis la nuit trouver repos,
Et n’ai pu dormir, les yeux clos.
Si par amour il veut m’aimer.
Et de son corps bien m’assurer,
Je ferai tout pour son plaisir ;
Lui en peut grands biens advenir :
De cette terre, il sera roi.
Il est si sage et si courtois.
Que, s’il m’aime avec douceur
Mourir me faut à grand douleur[1].

Le chambellan conseille à la princesse d’envoyer au chevalier me ceinture ou un anneau. S’il les reçoit avec plaisir, ce sera une preuve de son amour. La princesse répond :

Comment saurai-je par ce don.
Si d’amour a disposition ?
Jamais, je ne vis chevalier
Qui se fit pour cela prier ;
Et qu’il haït ou qu’il aimât

  1. Cela me coûtera beaucoup quand il me faudra mourir.