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Ô vous, faibles esprits, qui ne connaissez pas
Les plaisirs les plus doux que l’on goûte ici-bas,
Apprenez les transports dont mon âme est ravie.

Une douce langueur m’ôte le sentiment,
Je meurs entre les bras de mon fidèle amant
Et c’est dans cette mort que je trouve la vie…


MADRIGAL


En vain tu veux me secourir,
Raison, je ne veux pas guérir,
De ces maux mon cœur est complice.
Cessez de tourmenter mes esprits abattus.
Faux honneur, faux devoir. Si l’amour est un vice,
C’est un vice plus beau que toutes les vertus.


ARTICLES D’UNE INTRIGUE DE GALANTERIE


Un amant qui voudrait aspirer à me plaire
Doit avoir l’esprit délicat
Et craindre surtout d’être ingrat
À la moindre faveur que je lui voudrai faire ;
Paraître fort soumis quand je suis en colère,
Croire mon courroux important.
Car de rien quelquefois je me fais une affaire
Et je veux qu’on en fasse autant.

Comme on croit qu’un poulet est un mets agréable
Oui nourrit bien souvent l’amour,
J’en veux avoir un par jour
Ou qu’on m’en donne au moins une excuse valable.
Ce n’est pas qu’un poulet soit toujours véritable,
Mais, sur le devoir d’un amant.
La pure vérité souvent est moins aimable
Qu’un mensonge dit galamment.

Bien qu’on ait cru toujours l’affreuse jalousie
Le partage des vrais amants,
Je blâme ces dérèglements
Qui, d’une passion, font une frénésie.
Pour moi je veux aimer sans soins et sans envie.
Sans crainte et sans précaution ;
Rien ne peut sur ce point troubler ma fantaisie :
J’ai mes attraits pour caution.