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se garde bien de « méconnaître que, sous un succès, il y a toujours une vertu. »

Eh ! bien, non, M. Barrès, sous un succès il y a rarement une vertu. Je défie un lecteur sincère et intelligent d’expliquer, d’après votre maxime, votre succès à vous. Des imbéciles incapables de saisir directement une pensée originale ; des imbéciles dont l’oreille fermée aux hommes est faite pour recueillir avec joie les échos, les bavardages des perroquets, les bafouillements des phonographes, vous appellent penseur, comme ils appellent astronome M. Camille Flammarion. Mais vous savez bien, vous, élève de tous les Renan, de tous les Taine, de tous les Maurras et de tous les Amouretti rencontrés, que votre pensée est empruntée ; vous n’avez d’autre esprit que « l’esprit de suite » et votre seule vertu intellectuelle se nomme docilité.

D’autres disent que vous écrivez bien. En effet, Monsieur, vous écrivez, d’ordinaire, comme un excellent élève de philosophie, en phrases soignées, lentes, grises : des platitudes bien rabotées. Quelquefois aussi vous décalquez, ouvrier patient, un rythme de Michelet et vous faites d’un mouvement de torrent je ne sais quelle stagnation décevante. On cherche la « petite se-