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thèse d’éthique. Enfin il subordonna la vérité libératrice à une théorie psychologique : « Le temps et les circonstances, qui élargissent les vues de la plupart des hommes, rétrécissent les vues des femmes presque invariablement. » Malheureusement, si l’auteur illustre cette hypothèse par la victoire chaque jour plus complète de Jude sur les préjugés et par la défaite finale de Suzanne, il la contredit par le changement, trop féminin alors, de Phillotson, d’abord intelligent et généreux, qui ensuite obéit aux plus ridicules convenances et se laisse persuader aux chuchotements des plus sordides calculs.

Thomas Hardy, intelligence anglaise, riche et complexe, mais perdue et tâtonnante au labyrinthe du détail, ne sait même pas pourquoi « l’expérience » de Suzanne et de Jude a échoué. Tantôt il allègue la doctrine psychologique de l’influence contraire du temps et des circonstances sur l’esprit féminin et sur l’esprit masculin. Parfois il croit que Suzanne, pour anesthésier une souffrance trop grande, s’est enivrée de foi mais que, ses enfants vivants, le temps ni les circonstances n’auraient rien pu contre elle. Ou bien il la déclare trop faible