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mes intentions. » L’inconscient applique, en effet, à l’exécution le conseil d’invention ; nous voyons le peintre ridicule faire son tableau à coups d’éponges, émerveillé à chaque instant, de la beauté de l’œuvre et du génie de l’ouvrier. Ai-je besoin de dire qu’il n’y a pas de tableau et que, pour découvrir ici ou là une ligne significative, nous sommes obligés à beaucoup d’indulgence et à beaucoup d’imagination ?

L’éponge — et c’est pourquoi quelques-uns crient au miracle — est trempée non dans l’eau, mais dans les plus éclatantes couleurs. Certaines taches, avec du recul et de la bonne volonté, semblent belles dans leur imprécision et font rêver, comme « les fentes des murailles, la cendre du foyer, les nuages, les fanges », comme tout ce qui est lumière ou couleur affranchie du dessin et de la logique.

Annunzio est né pour de brefs élans lyriques et pour de petits hasards heureux ; il faut placer, très bas encore, mais bien au-dessus de ses romans, les vers où il exprime avec une fougue jeune ce que le critique Chiarini appelle sa « démence aphrodisiaque. »

Puisque, au désordre vivant de ses odes et au désordre inorganique de ses romans, l’au-