Page:Ryner - Prostitués, 1904.djvu/186

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dessinée et modelée ; ce collégien incurable est mort prenant encore l’abondance pour l’harmonie et adorant sous le nom de callipyge la Vénus hottentote.

Le voici en face de ce qu’il peut comprendre le moins. Voici devant lui un rêve mélancolique, vaguement médiéval, non par amour d’une époque déterminée, mais par nostalgie, par besoin de fuite, et d’imprécision, et de lointain. Voici un breton triste qui dit.

Disciple d’Ossian, j’ai souffert comme lui.
Misérable chanteur errant de ville en ville,
J’ai connu les mépris et la haine servile
Et jamais en mon Ciel l’Espérance n’a lui.


Quand mon âme souffrait de ces mille douleurs,
Pour égayer un peu ma tristesse chérie,
Le Printemps éveillant la magique féerie,
Épandait la rosée au calice des fleurs.


Guidé par le murmure ailé des Angelus,
J’ai suivi vers le Nord les pèlerins austères
Et la troupe de ceux qui jouaient les Mystères.
— Mon front s’est incliné pendant les Oremus.


J’ai compris la beauté sereine de l’Armor,
Ses madones de bois, ses christs sur le Calvaire ;
Mes doigts ont égrené les perles du rosaire
Dans la lande d’ajoncs, parmi les genêts d’or.

Sans nulle malice, mais avec une rare incon-