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chanteuses de salons et de cafés-concerts

perdue, à la vouloir trop grande. J’ai tâché de goûter à la fois le rythme et la rime : le charme a disparu. J’ai été choqué par un manque d’harmonie vraiment désagréable. J’ai senti combien la rime riche, ce joyau lourd, cet ornement barbare, allait mal à la démarche légère du petit trottin si amusant à regarder. La rime riche convient au vers ferme, solide, rigide, tout d’une pièce, de Leconte de Lisle. C’est la massue qui prolonge et alourdit le bras du guerrier. Quelquefois aussi, c’est l’énorme pendeloque, parure de la lourde splendeur charnelle de l’Orientale. Elle détonne dans les vers d’une facture spirituelle de M. Coppée.

Mais ne nous hâtons pas trop de condamner. Cette dissonance de forme est peut-être l’expression nécessaire d’une pensée étrangement subtile, ou de je ne sais quel sentiment bizarrement pervers, ou encore de quelque imagination funambulesque, de quelque fantaisie extraordinaire. Essayons de lire en nous préoccupant du sens.

Hélas ! hélas ! trois fois hélas ! J’ai fait parler la femme à la démarche parisienne et aux ornements barbares. Elle n’avait rien à me dire. Elle a parlé quand même. Elle m’a dit des riens.