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faisceau de muscles que nous montrent, au moment de s’oindre pour la lutte, les athlètes du Vatican. Mais, en attendant, il faut que cette créature vivante, que peut-être vous tuerez plus tard, atteigne le plein développement de son corps et goûte la vie et porte la beauté de la jeunesse. Pour cela, il faut des écoles en pleins champs, des exercices physiques et des danses apprises comme une institution d’État. Qu’avons-nous à aller travailler et pâlir devant les vieux marbres sans têtes et sans mains des musées ? Ce sont nos poitrines et nos épaules qu’il faut rendre dignes d’être vues autant que les marbres d’Elgin ! N’écoutons ni les ascètes, ni les prédicants ! N’allons pas enfermer les meilleurs d’entre nous dans les cloîtres pour s’y dévouer à ce qu’on appelle pompeusement « le service de Dieu » ! Qu’ils se dévouent plutôt au service de l’homme ! « C’est le premier devoir de la femme que d’être belle, et il ne faut rien négliger pour qu’elle le remplisse. L’homme et la femme ont été voulus par Dieu parfaitement nobles et beaux aux yeux l’un de l’autre.... »

Or le grand obstacle à la Beauté plastique, c’est la misère. Et le sentiment esthétique, à défaut de sentiment humain, nous pousse à la combattre et à la vaincre. Par quels moyens ? Par tous les moyens : par la charité envers le malheur immérité