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force habituelle de leur esprit » ? Et pourquoi enfin, chez le même homme, ces impressions radieuses et désintéressées sont-elles d’autant plus vives et plus profondes que son cœur est plus libre des passions basses et des mesquines envies ? Pourquoi la joie des couleurs est-elle ressentie surtout par son âme lorsque son tempérament est sain, par son esprit quand il est calme, par ses sens quand ils sont reposés ? Pourquoi, dans ce cas, la joie des couleurs et leur souvenir accompagnent-ils toute sa vie ici-bas ? « Laissez votre œil se fixer sur un grossier morceau de branche d’arbre d’une forme curieuse, pendant une conversation rare avec un être qui vous est cher, ou qu’il s’y pose même inconsciemment. Et quoique la conversation puisse être oubliée, quoique chaque circonstance qui l’accompagne soit aussi perdue pour la mémoire que si elle n’avait jamais été, cependant votre œil, pendant toute votre vie, prendra un certain plaisir à de telles branches d’arbres, auxquelles il n’en aurait pris aucun auparavant, — un plaisir si subtil, une trace de sentiments si délicats, qu’ils nous laisseront tout à fait inconscient de leur particulier pouvoir, mais indestructibles par un raisonnement quelconque, et qui formeront par la suite une partie de notre constitution.... » Pourquoi ? Certes on explique bien des choses, dans nos écoles,