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de votre vie, le jour viendra où toutes les contorsions d’une pantomime de Noël ne parviendront pas à vous procurer un rire honnête.

Ce que vos parents veulent absolument vous faire porter comme beaux vêtements, portez-le — et portez-le fièrement et gentiment pour l’amour d’eux, mais, autant qu’il est en vous, veillez à travailler chaque jour à vêtir quelque être plus pauvre que vous. Et si vous ne pouvez le vêtir, au moins rendez-vous utiles avec vos mains. Vous pourrez faire vous-mêmes votre lit — laver votre vaisselle — nettoyer les objets dont vous vous servez — si vous ne pouvez faire autre chose.

Ne vous chagrinez ni ne vous tourmentez à cause des questions de religion et encore moins ne tourmentez les autres. Ne portez pas de croix blanches, ni de vêtements noirs, ni de guimpes. Personne n’a le droit de se promener en un uniforme agressivement céleste, — comme si c’était davantage son affaire ou son privilège que ce l’est de n’importe qui, d’être le serviteur de Dieu !

Venez en aide à vos compagnes, mais ne leur parlez pas religion et servez les pauvres, mais, de grâce, petits singes, ne leur faites pas de sermons ! Ils sont probablement, sans s’en douter, cinquante fois meilleurs chrétiens que vous, et, s’il faut que quelqu’un prêche, — laissez-les faire. Faites-vous d’eux des amis lorsqu’ils sont convenables, comme vous vous en faites des gens riches qui sont convenables. Partagez leurs sentiments, travaillez avec eux, et au bout de tout cela, si vous n’êtes pas sûres qu’on a des deux côtés du plaisir à se voir, retirez-vous de leur chemin. — Pour ce qui est de la charité matérielle, laissez-la faire aux gens plus vieux et plus sages et contentez-vous, comme les Athéniennes dans la procession de leur déesse tutélaire, de l’honneur de porter les corbeilles….