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par la mort des pauvres, vous pouvez en trouver la preuve dans la préface du rapport adressé au Conseil Privé par l’inspecteur des Services sanitaires, rapport qui vient de paraître ; cette préface contient des propositions de nature, il me semble, à causer quelque émoi, et relativement auxquelles vous me permettrez de noter les points suivants :

Il y a aujourd’hui au sujet de la propriété du terrain deux théories courantes et en conflit : toutes deux fausses.

La première consiste à dire que, d’institution divine, a toujours existé et doit continuer à exister un certain nombre de personnes héréditairement sacrées, auxquelles toute la terre, l’air et l’eau du monde appartiennent à titre de propriété personnelle ; desquelles terre, air et eau ces personnes peuvent, à leur gré, permettre ou défendre au reste du genre humain d’user pour se nourrir, pour respirer et pour boire. Cette théorie ne sera plus très longtemps soutenable. La théorie opposée est qu’un partage de toutes les terres de l’univers entre tous les prolétaires de l’univers élèverait immédiatement les dits prolétaires au rang de personnages sacrés, qu’alors les maisons se bâtiraient d’elles-mêmes et le blé pousserait tout seul et que chacun pourrait vivre sans avoir à faire aucun travail pour gagner sa vie. Cette théorie paraîtrait également insoutenable le jour où elle serait mise en pratique.

Il faudra cependant de rudes expériences et de plus rudes catastrophes, avant que l’opinion publique soit convaincue qu’aucune loi, quoi qu’elle concerne, moins que toute autre une loi concernant