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LE MARTYRE

jours après, ils furent conduits, ayant les mains attachées derrière le dos, au pied du tribunal du gouverneur. Cet homme cruel leur demanda leur nom, et quelle étoit leur profession : une multitude innombrable de peuple remplissoit l’audience, et l’on voyoit sur le visage de chacun la haine peinte avec les plus noires couleurs. Les accusés dirent leur nom, et confessèrent naïvement qu’ils étoient chrétiens. À cet aveu, et le juge et l’assemblée se récrient, s’emportent, frémissent de rage. Toute une ville est en mouvement pour perdre deux innocens. Quoi, dit le gouverneur d’un ton que la fureur rendoit terrible, deux jeunes téméraires oseront braver les immortels ? Les saintes ordonnances de nos princes seront foulées aux pieds ? À quoi ont donc servi tant de supplices ? C’est donc en vain qu’on a dressé des croix, qu’on a mis en usage le fer et le feu ; en vain les bêtes se sont rassasiées des corps de ces impies : où sont les chevalets, les lames de cuivre ardentes ? Où sont les tourmens les plus affreux, prolongés même jusqu’au-delà du trépas ? Quoi, tout cela a été inutile ; les hommes ne sont plus, leurs os ont été réduits en cendre ; à peine trouve-t-on la place où furent leurs tombeaux ; et le nom de Christ retentit encore à nos oreilles : des bouches sacrilèges font encore entendre ce nom odieux à la vue des autels, devant les images sacrées des Césars ? Non, non, n’attendez pas que cette audace criminelle demeure impunie.