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au point de faire honte aux unions consacrées par la loi et sanctifiées par l’Église. — Les alliances entre les Blancs et les femmes mulâtres sont fréquentes, en raison surtout de ce que les parens de couleur, quand ils sont aisés, marient très-volontiers leurs filles à des Blancs, sans trop s’arrêter au désavantage de leur position sociale. Aussi les jeunes gens d’Europe, quand ils ont un extérieur agréable et quelques notions du commerce, contractent facilement des mariages riches avec des femmes de couleur. On remarque dans tout cela une tendance constante des couleurs foncées, à rapprocher leur postérité de la couleur blanche : c’est ce qui donne la clef de beaucoup de choses qui pourraient être pour l’Européen un sujet d’étonnement.

Après ces observations sur les Mulâtres du Brésil, nous passons aux costumes, au caractère, aux mœurs des habitans des diverses provinces, et il ne sera pas nécessaire de répéter que par Brésiliens nous entendons, une fois pour toutes, non-seulement les Blancs nés au Brésil, mais tous ceux qui, pour un motif tel quel, sont regardés comme Blancs ; enfin, pour ce qui concerne les classes inférieures, il faut y ajouter la plupart des Mulâtres.

Il serait difficile de peindre en traits prononcés et généraux le caractère national des Brésiliens ; d’autant plus difficile qu’ils commencent à peine à former une nation. Ils participent, en général, aux traits principaux du caractère portugais. D’un autre côté, l’on voit les classes élevées et surtout dans les ports de mer, renoncer à ce qu’elles ont d’original, pour s’adonner à l’imitation des mœurs anglaises imitation qui ne peut tourner beaucoup à l’avantage des habitans, et qui malheureusement n’est propre qu’à déguiser la faiblesse et l’absence de solidité sous des exigences et des formalités de tout genre. Ces mœurs d’ailleurs supposent un degré de civilisation qu’elles ne donnent pas : de plus, elles restreignent la manifestation et les développemens des dispositions naturelles dont les peuples méridionaux sont si richement doués, et, le plus souvent, elles les rejettent comme étrangères au ton de la bonne compagnie.

S’il y a peu de différence à cet égard entre Lisbonne et Rio-Janeiro, il en est autrement des classes inférieures : celles-ci peuvent seules être appelées du nom de peuple. En effet, rien chez elles n’arrête les développemens du caractère national ; car elles se distinguent à Rio-Janeiro et dans les environs des claies inférieures du Portugal, ou du moins de la capitale du Portugal, par leurs manières plus ouvertes, et elles ont une plus grande activité. Tout à Rio-Janeiro est plus animé, plus bruyant, plus varié, plus libre. Dans les parties de la ville habitée par le peuple, la musique, la danse, les feux d’artifice, donnent à chaque soirée un air de fête, et si