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domine la rotonde, une partie du lac, & de superbes allées d’arbres toujours verts à droite & à gauche.

Entrez dans le labyrinthe, qui est à droite, & suivez-en les détours, vous y trouverez de jolies salles & des lits de verdure fort agréables. Au milieu de l’allée qui est vis-à-vis de l’angle des pavillons, est une statue de Mercure volant. Cette allée vous conduit à une éminence ornée de cyprès, & sur laquelle est le monument de la reine Caroline 19, dont la statue est élevée sur quatre colonnes ioniques. Comme ce monument est presque environné de bois, le principal objet qui frappe de ce point de vue, est la rotonde à l’autre bout de la prairie.

En continuant votre route après avoir traversé quelques groupes d’arbres, vous arrivez à l’extrémité d’un grand lac 20, dont l’aspect est délicieux. Ses bords sont des promenades de gazon, ombragées des plus beaux arbres : d’un côté est le vaste tapis verd, dont l’inégale surface est couverte de troupeaux de toute espèce ; de l’autre, un bois touffu, où l’on distingue confusément des grottes, des sentiers, des statues. L’extrémité opposée du lac vous frappe agréablement par une superbe cascade 21, dont les eaux se précipitent à travers des rochers, & des ruines artificielles bien imitées. Le pied des rochers se divise en plusieurs grottes remplies de dieux marins. C’est à mon gré de toutes les scènes de Stowe la plus piquante & la plus animée. Les cignes nombreux dont le lac est couvert, les poissons qui jouent à sa surface, l’éclat des eaux & de celles de la cascade, quand elles sont frappées des rayons du soleil ; ces bois dont les teintes sont si variées ; cette prairie couverte de troupeaux, ces temples qui s’offrent de toutes parts ; ces petites îles ornées de grouppes d’arbres ; les images des arbres & des rochers réfléchies dans l’eau, tous ces objets forment une perspective qui tient du romanesque.

En vous promenant le long du lac, vous vous trouvez insensiblement le long de la terrasse du couchant, dont l’angle forme une espèce de bastion rempli par un petit bocage d’arbres verts, & par le temple de Venus 22. Ce bâtiment est composé de trois pavillons, unis par six arcades, & il représente un demi-cercle. La porte du pavillon du milieu est ornée de deux colonnes ioniques, & supporte une demi-coupole sculptée en petits lozanges. Le reste de la façade est rempli par quatre niches ornées par quatre bustes : l’intérieur est orné de peintures dont le sujet est pris de la Reine Fée de Spenser. C’est la belle Hellinore qui, dégoûtée de son vieux mari Malbecco, s’est enfuie dans les bois, où elle vit avec les satyres. Malbecco, après l’avoir longtemps cherchée, la trouve enfin, & veut lui persuader de le suivre ; mais elle le repousse avec mépris, & le menace de le livrer aux satyres, s’il ne se retire promptement. Le vieillard obéit, mais avec les marques du désespoir. Le plafond est orné d’une Venus : sur la frise on lit ces vers de Catulle :

Nunc amet qui nundum amavit,
Quique amavit nunc amet.


Ce temple est appelle le bâtiment de Kent, parce que cet architecte a été le vrai créateur de Stowe, & en a donné les dessins.