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Il faut de la variété non-seulement dans le dessin général, mais encore dans chaque pièce séparée ; si deux bosquets, par exemple, sont à côté l’un de l’autre, quoique leur forme extérieure & leur grandeur soient égales, il ne faut pas pour cela répéter le même dessin dans tous les deux, mais en varier le dedans. Cette variété doit s’étendre jusques dans les parties séparées ; par exemple, si un bassin est circulaire, l’allée du tour doit être octogone. Il en est de même d’un boulingrin & des pièces de gazon qui sont au milieu des bosquets.

On ne doit répéter les mêmes pièces des deux côtés, que dans les lieux découverts, où l’œil, en les comparant ensemble, peut juger de leur conformité, comme dans les parterres, &c.

En fait de dessins, évitez les manières mesquines, donnez toujours dans le grand & dans le beau, en ne faisant point de petits cabinets de retour, des allées si étroites, qu’à peine deux personnes peuvent s’y promener de front : il vaut mieux n’avoir que deux ou trois pièces un peu grandes, qu’une douzaine de petites, qui sont de vrais colifichets.

Avant de planter un jardin, on doit attentivement considérer ce qu’il deviendra, vingt ou trente ans après quand les arbres seront grossis, & les palissades élevées. Un dessin paroît quelquefois beau & d’une belle proportion dans le commencement que le jardin est planté, qui dans la suite devient trop petit & ridicule.

Après toutes ces règles générales, il faut distinguer les différentes sortes de jardins ; elles se réduisent à trois ; le jardin de niveau parfait, le jardin en pente douce, & le jardin dont le niveau & le terrein sont entrecoupés par des chûtes de terrasse, de glacis, de talus, de rampes, &c.

Les jardins de niveaux parfaits sont les plus beaux, soit à cause de la commodité de la promenade, soit par rapport aux longues allées & enfilades où il n’y a point du tout à descendre ni à monter ; cela les rend d’un entretien moins dispendieux que les autres.

Les jardins en pente douce ne sont pas si agréables & si commodes : quoique leur pente soit imperceptible, elle ne laisse pas de fatiguer & de lasser extraordinairement, puisque l’on monte ou que l’on descend toujours. Les pentes sont fort sujettes à être gâtées par des ravines, & sont d’un entretien continuel.

Les jardins en terrasses ont leur mérite & leur beauté particulière, en ce que du haut d’une terrasse, vous découvrez tout le bas d’un jardin ; & les pièces des autres terrasses, qui forment autant de différens jardins, qui se succèdent l’un à l’autre, causent un aspect fort agréable & des scènes différentes. Ces jardins le disputent en beauté à ceux de niveau, si toutefois ils ne sont pas coupés par des terrasses trop fréquentes, & si on y trouve de longs plein-pieds. Ils sont fort avantageux pour les eaux qui se répètent de l’une à l’autre ; mais ils sont d’un grand entretien & d’une grande dépense.

C’est d’après ces différentes situations que l’on doit inventer la disposition générale d’un jardin, & la distribution de ses parties. Tels sont les préceptes de M. le Blond. Si on