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des logemens, veulent en prendre fort peu pour se nourrir.


Section IV.

De la manière d’extraire le miel des gâteaux.


Dès qu’on a sorti les gâteaux de la ruche, il faut choisir les plus beaux, les plus blancs, & les séparer de ceux qui sont noirs ou bruns, & de ceux qui contiennent la cire brute ou du couvain : les plus beaux sont ordinairement sur les côtés de la ruche. On passe légèrement la lame affilée d’un couteau, sur la surface des rayons pleins de beau miel, pour détacher les couvercles des alvéoles qui l’empêcheroient de couler. On rompt ensuite en plusieurs pièces tous ces gâteaux qu’on a séparés, & on les met dans des paniers très-propres, ou sur des claies d’osier, ou sur une toile de canevas tendue sur un chassis ; ou enfin sur une toile de crin assez claire : on place au-dessous des vases de terre-vernissés, pour recevoir le miel qui va couler : si l’air étoit froid, il faudroit approcher les gâteaux, ainsi placés, d’un feu modéré, afin que le miel coulât plus aisément. Lorsque ce premier miel, qui est toujours le plus beau & le meilleur, & qu’on nomme pour cela miel vierge, est sorti, on brise les gâteaux avec les mains, sans les pétrir, en y ajoutant ceux qui sont d’une moindre qualité, & on les remet, comme on vient de dire, dans des panniers, ou sur des claies, il en découlera un autre miel qui sera encore fort bon, quoique d’une qualité inférieure au premier. Lorsqu’il n’en coule plus du tout, on pétrit les gâteaux avec les mains, sans y mêler ceux qui contiennent du couvain qui feroit aigrir le miel. En ayant formé une espèce de pâte, on la met sous une presse, ou simplement dans un gros linge & fort, que deux personnes, dont chacune tient un bout, tordent fortement ; il sortira encore de cette pâte quelque peu de miel très-grossier, à la vérité, & qui peut cependant être encore de quelque utilité. Il faut avoir attention de ne point se servir de la presse, ni pour le premier, ni pour le second miel : ce seroit le moyen d’y mêler de la cire, qui le rendroit moins beau & altéreroit sa qualité. Le miel qu’on a fait découler des gâteaux, n’a besoin d’aucune sorte de préparation ; il suffit de le mettre dans des vases bien propres, dont l’intérieur soit vernissé, & de les boucher pour le conserver.


Section V.


Des différentes qualités du miel.


Quoique tout le miel provienne généralement des mêmes principes, qu’il soit fait & préparé par les mêmes ouvrières dont la méthode est uniforme, il y en a cependant dont les qualités & les propriétés diffèrent essentiellement, & pour la couleur & pour le goût. Il en est du miel comme de toutes les productions de la terre ; la diversité des climats, les différentes natures du sol, la manière de cultiver, donnent aux productions des végétaux des qualités qui varient presque à l’infini. La nature & la qualité du miel subissent toutes ces variations. Celui qu’on recueille sur les montagnes où abondent toutes sortes de plantes aroma-