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sacrifier ses rameaux, il convient d’avoir un vase de fer-blanc ou de bois, en deux pièces, de manière que chaque pièce fasse exactement la moitié, & un tout par leur réunion. La seule attention que ces marcottes exigent, consiste à tenir la terre des vases souvent arrosée, afin d’y entretenir une humidité convenable : comme le vase est environné par un grand courant d’air, son évaporation est considérable.

Si on désire que ces marcottes, d’ailleurs très-casuelles, réussissent, il convient d’avoir, par avance, fait la soustraction circulaire d’une portion de l’écorce, ainsi qu’il a été dit, ou d’avoir ménagé un bourrelet, par des ligatures, ou d’avoir fait une entaille à la branche, ou enfin, de la traiter comme une marcotte d’œillet. Il est très-difficile autrement de réussir sur des arbres à écorce lisse, & dont les boutons percent difficilement la peau ; les marcottes sont plus difficiles encore sur ceux qui sont remplis de moelle, & dont l’écorce est fine.

M. le Baron de Tschoudy fait, dans le Supplément du Dictionnaire Encyclopédique, des observations qui méritent d’être rapportées.

« Les auteurs du jardinage n’indiquent, dit-il, pour marcotter, que le printemps & l’automne ; cependant chacune de ces saisons a des inconvéniens pour ce qui concerne certains arbres. Il en est de délicats, dont les branches, très-fatiguées par l’hiver, loin d’avoir, au retour du beau temps, assez de vigueur pour produire de leur écorce des racines surnuméraires, ont à peine la force qu’il leur faut pour se rétablir. D’autres arbres, tendres, mais qui nous viennent des contrées de l’Amérique septentrionale, où la terre profonde & humide, & les longues automnes, les excitent à pousser fort tard, conservent cette disposition dans nos climats ; mais leur végétation vive, leurs jets pleins de sève, se trouvent brusquement saisis par nos premières gelées. Que l’on couche leurs branches en automne, l’humidité de la terre hâtera leur destruction. Si on attend le printemps, on les trouvera alors moëttes par le bout ; on ne saura pas précisement où finit la partie desséchée & chancie, & où commence la partie vive & saine, qui sera d’ailleurs le plus souvent trop courte pour se prêter à la courbure qu’il convient de lui donner ».

« On préviendra ces inconvéniens, si l’on fait, au mois de juillet, les marcottes de ces arbres un peu avant le second élan de la sève. Dans nos climats, (L’auteur écrivoit en Alsace) les printemps maussades & fantasques, ne laissent à la première végétation qu’un mouvement foible & intermittent ; son jet d’été, moins contrarié, est ordinairement plus soutenu, plus vigoureux ; ainsi, nos marcottes ne sont guères moins avancées que celles de la première saison. En général, elles seront parfaitement enracinées à la seconde automne ou au second printemps, sur-tout, si aux soins ordinaires, on ajoute de répandre sur leur partie enterrée, de la rognure de buis, ou telle autre couverture capable d’arrêter la moiteur qui s’élève du fond du sol, & de conserver le bénéfice des pluies & l’eau des arrosemens. La baie du bled, de l’orge, de l’avoine, &c. produira le même effet ».