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pour fumer les abeilles lorsqu’on veut prendre leurs provisions.

Trois de ces hausses, placées l’une sur l’autre, composent une ruche, que la forme de leur construction rend très-solide ; elles sont cousues l’une à l’autre avec une aiguille ou carrelet de deux à trois pouces de longueur, & de la ficelle de moyenne grosseur, qu’on passe dans les liens qui attachent la paille. Avant de placer ces sortes de ruches, on met sur leur table une natte un peu convexe, de huit à neuf pouces environ de diamètre. Cette précaution est nécessaire, afin d’empêcher les abeilles de prolonger leurs gâteaux sur la table ; ce qui seroit sujet à bien des inconvéniens. L’entrée par laquelle passent les abeilles pour gagner l’intérieur de leur domicile, n’est point pratiquée au bas de la hausse inférieure, mais sur la table même. Cette ouverture est une entaille qu’on fait sur les bords du devant de la table, & qu’on prolonge jusque dans l’intérieur de la ruche ; elle a neuf à dix lignes de profondeur, sur quatre pouces de largeur. On a soin de lui donner assez de pente vers les bords pour faciliter l’écoulement des eaux ; sa largeur diminue un peu en approchant de la ruche ; elle est prolongée jusqu’au bord de la natte voûtée, où sa profondeur, bien ménagée dès l’entrée de la ruche, devient presque insensible.

Le surtout qui couvre ces sortes de ruches, est un glui de paille de seigle qu’on lie fortement à un de ses bouts, & qu’on écarte ensuite en forme de cône creux pour le placer sur la ruche, en ayant attention de n’échancrer la paille que sur la porte de la ruche, qui se trouveroit fermée sans cette précaution. Pour prévenir les fractures que les rats, les souris peuvent faire facilement, & en très-peu de tems, à ces sortes de ruches, M. de Boisjugan conseille de les enduire extérieurement avec de la suie détrempée, dans laquelle on peut mêler du verre pilé.

Ces sortes de ruches sont aussi aisées à construire qu’elles sont peu dispendieuses ; les gens de la campagne n’ont pas besoin d’avoir recours à des ouvriers pour s’en procurer ; ils peuvent eux-mêmes les faire en hiver, dans les tems où ils n’ont pas d’ouvrages dans le dehors : il ne faut que de la paille & des ronces fendues en trois ou quatre pièces pour la lier ; on en forme un cordon d’un pouce d’épaisseur, qu’on attache fortement avec les ronces ; pour le rendre bien égal, on peut le tenir dans un ou plusieurs anneaux d’un pouce de diamètre, qu’on fait glisser à mesure qu’on avance l’ouvrage. On commence la hausse par la partie convexe ; & lorsqu’on est parvenu à lui donner la largeur qu’elle doit avoir, on continue le cordon perpendiculairement, jusqu’à ce qu’on ait fait quatre tours complets, qui donneront la hauteur de la hausse ; il faut avoir attention que le dernier cordon finisse insensiblement, afin que la hausse puisse porter à plein sur la table.

L’avantage le plus réel de ces sortes de ruches, c’est le peu de dépense qu’il faut faire pour s’en procurer, si on ne veut point prendre la peine de les construire soi-même, puisque le prix qu’elles