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nera l’émétique en lavage ; on appliquera les vésicatoires aux cuisses & entre les deux épaules ; on lui donnera des lavemens purgatifs. (Voyez Médicament : dans cet article, nous avons réuni tous les remèdes simples, avec la manière de les composer, & l’indication des cas dans lesquels ils sont nécessaires.) Si les symptômes continuent, si le pouls est toujours plein & élevé, il faut réitérer les saignées à la gorge & au pied : mais il est de la plus grande importance de ne pas précipiter tous ces moyens ; il faut les placer par ordre, & imiter la nature, qui chemine lentement dans sa marche. C’est ici sur-tout qu’il faut bien se garder de donner l’émétique en dose assez forte pour exciter de violens vomissemens, & de faire usage d’alcali volatil ; les ruptures des vaisseaux & les épanchemens deviennent les suites de ce traitement barbare & ignorant.

Dans l’apoplexie séreuse, si le malade n’a pas l’estomac plein, une saignée du bras ou du pied convient pour donner plus de jeu aux vaisseaux ; mais le plus souvent il ne faut pas la réitérer : si l’estomac est plein, il faut donner l’émétique en doses assez fortes pour exciter le vomissement ; il faut piquer, irriter, frotter le corps avec des linges rudes & avec de l’ortie ; ces différens moyens réveillent le ton des fibres engourdies, raniment la circulation qui languit : à ces moyens, on ajoute les lavemens purgatifs, ensuite les purgatifs ; on applique aussi de grands & larges vésicatoires entre les deux épaules & aux cuisses. On peut faire aussi respirer au malade de l’alcali volatil, lui en faire même avaler avec succès quelques gouttes dans un peu d’eau : c’est le cas où on peut tirer quelques secours de ce remède, en le considérant comme donnant du ton aux parties relâchées, & comme un remède auxiliaire ; mais il ne faut jamais le regarder comme un spécifique particulier à cette maladie. L’observation & la raison ont détruit aisément le brillant fantôme que l’enthousiasme avoit enfanté sur ce remède héroïque ; on l’a mis maintenant à la place qu’il peut occuper : ce remède est dans la classe des remèdes actifs, qui exigent dans leur administration la main d’un homme sage & éclairé, & qui deviennent des poisons dans celle d’un enthousiaste ignorant. L’ambition de faire le bien ne suffit pas pour avoir des succès constans ; il faut des lumières & de l’exercice ; & ordinairement les enthousiastes sont peu éclairés, & n’ont pas la tranquillité & la justesse du raisonnement qui forment l’excellent observateur.

Si la médecine, qui guérit les maladies terribles qui affligent l’humanité dans le moment de leur invasion, est une science utile & respectable, nous croyons qu’elle ajoute encore à sa gloire, en enseignant la route qu’il faut suivre pour éloigner ou pour détruire les semences des maladies, & pour empêcher leur retour.

Il est bien plus aisé de donner des conseils salutaires pour empêcher le retour de l’apoplexie, qu’il n’est facile de déterminer les malades à en faire usage ; ils sont sur cet article d’une inconséquence d’autant