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(c’est M. Monnereau qui parle) le franc, le bâtard & le guatimalo ; ce dernier tire son origine de la côte espagnole dont il porte le nom. Le premier rend plus à la teinture, & elle se fait avec beaucoup de facilité ; mais le succès de sa plantation est fort douteux : sa tige tendre & délicate en naissant, est susceptible de beaucoup d’avaries. Le vent, la pluie, le soleil, tout conspire à sa destruction. La terre même où il croît semble lui refuser ses secours ; si elle est un peu usée, il languit sur pied, & ne produit que de foibles tiges qui périssent dès leur naissance. Le brûlage est un autre accident aussi fâcheux que les premiers, & dont on parlera en traitant de sa culture. Il y est fort sujet pendant tout le premier mois de sa végétation, de sorte que l’habitant est toujours entre la crainte & l’espérance.

L’indigo bâtard diffère du premier. Il est moins haut, sa feuille est plus longue, plus étroite, d’un verd beaucoup plus clair, un peu blanc en dessous, moins charnu, rude au toucher, même jusqu’au picottement. Les gousses sont jaunes, & la graine noire. Il s’éleveroit à la hauteur de six pieds, si l’intérêt n’obligeoit de l’arrêter avant qu’il ait acquis sa grandeur naturelle. Il a l’avantage de venir par-tout & en tout tems.

Le guatimalo ressemble assez complétement au second, à l’exception des siliques dont la couleur tire sur le rouge brun, ainsi que celle de la gousse.

L’indigo sauvage croît naturellement dans les prés : il ressemble à un arbrisseau dont le tronc est court, touffu & fort gros ; ses branches sont adhérentes à la racine, les feuilles plus rondes & plus petites que celles du franc, mais très-minces. Il ne vaut pas la peine d’être cultivé.

Il en est ainsi de l’indigo mary qui ressemble beaucoup au franc par sa feuille, mais elle est moins charnue.

II. De la culture de l’anil, ou indigo franc.

1o. Du tems de le semer. Ceux qui ne veulent pas risquer leurs graines commencent à les semer après les fêtes de Noël, & peuvent continuer jusqu’au mois de Mai ; ce dernier semis est même le plus favorable ; il est moins sujet au brûlage que si on le semoit dans une saison plus avancée. Il ne produit que deux ou trois coupes, tandis que celui semé beaucoup plutôt en produit jusqu’à cinq. L’anil bâtard se plante depuis la Toussaint jusqu’au mois de Mai inclusivement.

Avant de semer l’indigo, il faut arracher avec la houe les vieilles souches, & purger le terrain de toutes les mauvaises herbes ; aucune plante ne souffre plus que celle-ci du voisinage des plantes parasites. Des souches & des herbes arrachées, on en fait un monceau auquel on met le feu, & les cendres qui en résultent sont dispersées sur le terrain. Quoique je n’aie jamais cultivé l’indigo en grand, j’oserai cependant dire qu’il vaut mieux transporter dans un coin du champ ces vieilles souches & les mauvaises herbes, sur-tout si elles ne sont pas grainées, les y amonceler, couvrir le monceau avec trois à quatre pouces de terre, la bien battre, & laisser le tout pourrir & se réduire