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se sont emparées de tous les ananas d’une serre. On a essayé plusieurs moyens pour parvenir à leur destruction ; la multiplicité des recettes prouve assez leur inutilité. Voici cependant celle qui est le plus en usage. Dans un vaisseau quelconque rempli d’eau, on fait une forte infusion de tabac ; & après avoir enlevé toute la terre autour des racines de la plante, on la plonge entiérement dans cette infusion, où elle reste environ pendant vingt-quatre heures. Lorsqu’on la retire de ce bain, on la plonge de nouveau dans un bain d’eau propre ; une éponge sert à nettoyer les feuilles, le dedans, le dehors, & le dessous du pot dans lequel on doit la replanter, & on lui donne de la terre neuve. Après l’opération, le pot est mis dans la tannée, à laquelle on a ajouté du tan neuf, afin d’y renouveler la chaleur. Ces insectes multiplient beaucoup plus dans l’été sur les plantes qu’on tient trop sèches, que sur celles dont les vases sont pourvus d’un peu d’humidité. Les irrigations en manière de pluie ne détruisent point ces insectes : ils se serrent & se collent plus contre les feuilles, & leur couverture en forme de bouclier, laisse couler l’eau qui devroit leur nuire.

VI. Des qualités du fruit. Dans le pays où l’ananas est indigène, on attend que le fruit ait presqu’acquis sa maturité ; alors, il est séparé de la tige & suspendu pendant quelque tems, & son goût est plus relevé, parce que l’eau surabondante de végétation s’est dissipée, & cette eau dans l’ananas, comme dans tous les fruits quelconques, noie les principes aromatiques, & est mal-saine. Pour le manger, on le sépare de sa couronne ; quelques-uns enlèvent l’écorce du fruit sur deux lignes d’épaisseur, le coupent horizontalement en tranches minces, les saupoudrent d’un peu de sel, & les laissent ainsi macérer dans l’eau pendant quelques instans ; d’autres font tremper ces tranches dans du vin d’Espagne, auquel on a ajouté du sucre. En Asie, on regarde ce fruit comme très-échauffant, nuisible aux personnes attaquées de maladies cutanées. Il est imprudent d’en manger plus d’un. L’ananas a l’avantage de réunir le parfum de nos meilleurs fruits. On croit reconnoître le goût de la fraise, de la framboise, de la pêche, de l’abricot, de la pomme de reinette, &c. ceux que nous cultivons dans nos serres n’ont jamais la même délicatesse, & nos soins multipliés n’équivalent jamais aux moyens simples employés par la nature.

L’odeur, & non la couleur du fruit, décide de sa maturité ; & lorsque les tubercules ont perdu un peu de leur fermeté, il est tems de le cueillir ; si on attend sa parfaite maturité sur la plante, sa chair devient molasse, & son parfum diminue. Pour le manger bon, il faut le prendre au point convenable.


ANASARGUE. (Voyez Hydropisie)


ANATOMIE DES PLANTES. S’il est intéressant au médecin qui consacre ses veilles, ses forces & sa vie au soulagement des malades, de connoître partie par partie tout