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on les arrosera de tems à autre : ils pourriroient dans une terre humide. Lorsqu’ils ont une fois commencé à pousser leur tige, l’humidité ne leur est pas si contraire. Vers le milieu ou vers la fin de Septembre, quand il se trouve des oignons assez forts pour fleurir, on en voit sortir le bouton à fleur, qui, pour l’ordinaire, est d’une couleur rouge. On aura pour lors la précaution de placer les pots où sont les oignons, de façon que ces plantes soient frappées du soleil le plus long-tems que faire se pourra, & qu’elles soient principalement à l’abri du vent du nord. On évitera pareillement de les mettre trop près d’un mur, ou sous un châssis, parce qu’en ces deux cas, leurs tiges seroient foibles & grêles, & leurs fleurs n’auroient pas toute la beauté qu’elles doivent avoir. Si la température se trouve chaude & sèche dans cette saison, on donnera de tems en tems à ces plantes, assez d’eau pour que l’oignon puisse être tenu fraîchement ; il n’y a plus alors de risque qu’il pourrisse par trop d’humidité ; mais si la saison devient très-pluvieuse, il sera à propos de mettre ces plantes à couvert, afin qu’elles n’aient que la quantité d’eau qui leur convient.

Aussitôt que les fleurs commenceront à épanouir, on portera les pots dans un endroit moins chaud, où ils ne soient exposés ni à la pluie, qui gâteroit les fleurs & nuiroit à leur belle couleur, ni aux rayons du soleil, qui avivent, il est vrai, les couleurs, mais qui les rendent trop foncées, & ne donnent pas le tems à l’amateur de jouir de la beauté de la fleur qu’il a cultivée. Une orangerie où l’air se renouvelle continuellement, & qui est fraîche & sèche en même tems, est un lieu convenable pour assurer une plus longue existence à la fleur. Avec ces secours, les fleurs se conservent presque un mois entier.

Lorsque les fleurs sont passés, les feuilles commencent à pousser ; & si on a soin de les garantir du grand froid, leur végétation ne cesse point de tout l’hiver ; c’est même pendant ce tems-là qu’elles s’alongent. Si la saison est douce, on laisse ces plantes au grand air, & on ne les couvre que pendant les pluies & les froids vifs. Une couche chaude, garnie d’un châssis, leur devient avantageuse.

On arrache tous les quatre ou cinq ans les oignons de terre pour séparer les petits cayeux qui se dévorent les uns & les autres, & on les replace dans une terre neuve.

Les habitans de Guernesey ne se donnent pas autant de peine que les fleuristes de Paris. Ils plantent tout simplement les oignons dans une couche ou planche de terre commune, & ils les y laissent pendant plusieurs années sans culture. Ces oignons produisent dans cet espace de tems, une si grande quantité de cayeux, qu’à différentes fois on en a trouvé même plus d’un cent autour d’un seul oignon. Leur grand nombre nuit à leur qualité.

Lorsque les cultivateurs de ces oignons veulent en faire plusieurs pieds, ils séparent les cayeux ; mais auparavant ils choisissent dans leurs jardins une place abritée, & ils y font une couche. Pour cet effet, ils prennent dans une prairie un tiers de terre végétale neuve & légère,