Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/354

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui, depuis dix ans, s’étoit rouvert & cicatrisé plusieurs fois, étoit parvenu au point d’une pourriture considérable, accompagnée de fièvre & d’inflammation, fut guéri par les mêmes compresses. La progression en bien étoit si prompte, qu’elle se manifestoit d’un pansement à l’autre, & l’ulcère étoit de la grandeur de la main.

Un nouvel avantage de l’air fixe est sa qualité lithontriptique ou sa facilité à détruire les pierres de la vessie & les calculs. L’exemple de Jean Dobey, guéri par le célèbre médecin Hulme, est bien frappant. Par le moyen de l’air fixe, il parvint à dissoudre la pierre, & le malade l’a rendue avec les urines sous forme de gravier. M. Hulme lui faisoit prendre quatre fois par jour quinze grains de sel alkali fixe de tartre, dissous dans trois onces d’eau ordinaire, & il lui donnoit ensuite la même mesure d’eau dans laquelle on avoit étendu vingt gouttes d’esprit de vitriol foible. L’esprit de vitriol rencontrant dans l’estomac l’alkali fixe de tartre, l’attaque vivement, le dissout & dégage ainsi l’air fixe qui de là pénètre avec les urines dans la vessie où il attaque à son tour & détruit la pierre qui s’y forme.

Tous ces exemples réunis prouvent l’efficacité médicinale de l’air fixe dans quantité de maladies sérieuses. Pourquoi n’en multiplie-t-on pas l’expérience, & n’étend-on pas son usage sur les maladies réputées incurables, & dont il seroit peut-être le vrai remède ? On lui trouveroit sans doute des vertus éminentes dans bien des cas, mais dont la connoissance n’est réservée qu’à nos recherches & à nos travaux.


Section IV.

Effet de l’Air fixe sur l’économie animale & végétale.

L’air fixe, considéré isolé, seul & indépendamment des substances auxquelles il est communément uni, se présente à nous en même tems & comme principe utile & nécessaire à l’entretien de l’animal, & comme cause accidentelle de sa mort. Il est cependant le même ; sa manière d’agir paroît seulement différente. Si la putréfaction & la décomposition animale ne sont que l’effet de l’échappement de l’air fixe qui faisoit le lien & le nœud de toutes les parties, il faut convenir que ce fluide est la base de leur conservation. C’est le ciment, pour ainsi dire, qui unit les fibres entr’elles, forme les masses, & consolide la machine entière. Il se combine avec les fluides, & peut-être est-il un de leurs principes constitutifs. Sa légère acidité empêche cette tendance naturelle qu’ils ont à l’alkalescence. Il circule partout avec eux, & se fixe de tous côtés. En un mot, il paroît être & le lien & l’aliment nécessaire dans l’économie animale. Ce principe demande à être un peu plus développé.

Comment & par quel organe ce fluide dangereux peut-il pénétrer dans toute la masse, & ne laisse-t-il que des traces du bien qu’il fait lorsqu’il n’est qu’à la dose nécessaire ? Voici la réponse que l’on peut donner. Toutes les substances qui servent à nos alimens, contiennent plus ou moins d’air fixe, puisque toutes sont