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plus commode, & dans une habitation plus vaste que celle où elle a pris naissance. Avant de changer les abeilles de logement, on attache au sommet de la ruche dans laquelle on veut les faire passer, trois ou quatre morceaux de gâteaux de cire blanche ; & quand le changement de domicile est fait, on leur rend le rateau garni de tous les rayons qu’on y avoit placés, qu’on met sous la ruche. Dans cette nouvelle demeure, on tient encore les abeilles enfermées deux ou trois jours, après lesquels on leur rend la liberté. Si la campagne n’offroit point ou peu de récolte à faire, il faudroit les nourrir, jusqu’à ce que la saison devînt meilleure.

Cette méthode de former des essaims a eu beaucoup de partisans dans l’Allemagne : bien des personnes se sont empressées de répéter ces sortes d’expériences, que M. Schirach assure avoir toujours faites lui-même avec le succès le plus constant. Quand même on ne pourroit pas en tirer tout l’avantage que l’auteur annonce, ce seroit toujours une découverte des plus curieuses & des plus intéressantes touchant l’histoire naturelle des abeilles. M. Schirach qui auroit le mérite d’avoir cherché à se rendre utile, auroit par conséquent droit à notre reconnoissance.

On fait deux principales objections contre cette méthode de former des essaims. « o. C’est porter un grand préjudice aux ruches, que d’enlever une partie du couvain ». M. Schirach répond qu’on n’en doit prendre que dans les ruches fortes, & qui ont plusieurs années ; elles n’en souffriront aucun dommage, puisque leur perte sera entiérement réparée quinze jours après. « 2o. En enlevant le couvain, on empêche les ruches d’essaimer ». À cela, M. Schirach oppose les inconvéniens des ruches qui essaiment naturellement, dont les abeilles sont plusieurs jours oisives avant & après le départ des essaims ; les risques qu’on court de les perdre, à moins qu’on ne soit très-assidu à veiller leur sortie ; la peine & les difficultés de les recueillir, & celles de les conserver quand ils viennent trop tard.

M. Schirach a une autre méthode de former des essaims par le simple déplacement des ruches, dont voici les procédés.

On choisit pour cette opération des ruches bien peuplées, & qui sont abondamment pourvues de toutes sortes de provisions dans lesquelles il y a beaucoup de nouveaux couvains : on les transporte, à la fin de Février, à quinze ou vingt pas de distance de l’endroit où elles étoient, dans un jardin, s’il est possible qu’elles y soient bien exposées, ou sous quelque toit. Au commencement de Mai, on taille ces ruches transportées : quinze jours ou trois semaines après, si les abeilles ont suffisamment réparé leurs pertes, de manière que leur habitation soit bien remplie de gâteaux, on prend alors une ruche dans laquelle on veut former un essaim ; on la nettoie parfaitement & on frotte l’intérieur avec des feuilles vertes de mélisse. Autant qu’il est possible, on fait en sorte que cette ruche ressemble à celle où l’on veut prendre le couvain, afin de mieux tromper les abeilles. À une heure après midi, qui est