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JEAN RIVARD

Rivard, c’est Gérin-Lajoie fonctionnaire public — l’administration du gouvernement, il le supprime, après l’élection, dans l’édition définitive du roman, renvoyant au Foyer Canadien de 1864, pages 209 à 262, ceux qui désirent sur cette courte carrière politique du héros une plus ample information.[1]

Il faut donc juger ce livre par l’impression d’ensemble qui s’en dégage plus encore que par l’examen minutieux des détails de la composition. Il y faut chercher, non pas les fines analyses psychologiques qui y eussent été hors de propos, ni le jeu des passions qui eussent distrait le lecteur, ni les savantes combinaisons du style moderne, mais plutôt le développement d’une idée qui domine tous les récits, et que l’auteur a voulu imprimer sur chaque page du roman.

Ce livre est une thèse ; il est une démonstration, et il ne veut être que cela. Gérin-Lajoie l’a écrit pour persuader nos jeunes gens de s’attacher au sol, à la terre nourricière, et pour les inviter à abattre sans retard la forêt vierge où se découvrent l’avenir et la fortune de notre peuple. Ce livre était infiniment précieux, il était nécessaire à une époque où tant de familles canadiennes s’en allaient par delà la frontière, peupler la république voisine, et enrichir l’étranger ; il doit être encore très précieux, et il est nécessaire qu’on le replace sous les yeux de nos compatriotes, aujourd’hui que l’on parle de rapatriement, et que l’on s’aperçoit que la colonisation de la province de Québec est le problème essentiel, vital, dont il faut hâter la solution.

Faisons donc lire Jean Rivard. Faisons-le lire à nos jeunes filles pour qu’elles apprennent de Louise Routier les devoirs d’une mission sociale. Faisons-le lire à nos jeunes gens : aux jeunes gens des villes, sans doute, et aux étudiants eux-mêmes, pour qu’ils aperçoivent la noblesse, la dignité du colon, et pour qu’ils éveillent en eux, peut-

  1. Jean Rivard, II, 94.