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LA FERME DES PINS

paysanne, de dix-neuf ans, jeune fille forte et raisonnable, qui avant même de heurter l’obstacle possible à son mariage — obstacle d’ailleurs ici imaginaire — s’enferme tout à coup dans une impénétrable douleur, pleure pendant dix jours, — « elle pleure éperdument comme si son cœur entier devait couler dans ses larmes » — s’alite, s’isole, ne veut plus voir Georges qui se présente chaque jour, jusqu’à ce qu’enfin elle consente à le recevoir et à discuter avec lui les raisons de sa douleur. Tout cela est bien long et paraît bien factice. L’auteur, ici encore, a trop tardé à poser franchement le problème. Une grande partie du chapitre VII est employée par Georges et Madeleine à disserter dans le vague et l’abstrait sur l’épreuve, et ce n’est qu’au chapitre VIII que la question est enfin et précisément abordée. Et toutes ces discussions sont bien près de paraître oiseuses au lecteur, puisque celui-ci est déjà averti que James Robertson ne s’oppose pas au mariage de Georges et de Madeleine.

On préfère au portrait de Madeleine celui de Miss Parker. L’auteur a bien dessiné cette vieille Miss anglaise, rare survivante du groupe anglais d’Upton, et qui reste pour être une raisonnable dispensatrice de bons conseils à ses compatriotes. Tout ce que l’on peut reprocher à M. Harry Bernard, au moment où il lui envoie James Robertson, c’est de laisser entendre au lecteur trompé qu’elle pourrait n’être qu’une ancienne demoiselle qui attend encore un veuf, et que Robertson, qui a fait grande toilette pour cette visite, s’en va faire sa grand’demande.

Mais tout ce que nous croyons être des défauts de construction du roman, y compris la quasi invraisemblance d’un paysan anglais qui à soixante-cinq ans, et dans les circonstances que l’on sait, entreprend d’arracher ses fils à leur vie française, et veut recommencer la