Page:Roy - Le cadet de la Vérendrye, 1897.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.
24
UNE SURPRISE

ribond sur le lit de l’aubergiste. Malheureusement, je ne pouvais entendre ce qui se disait en dedans… et tu sais si je suis curieux.

— Oui, et avec ta curiosité tu finiras mal !…

— Juge un peu de mon étonnement, mon vieux, quand de mon poste d’observation, je constatai que l’indien reprenait ses sens. Je croyais pourtant l’avoir à jamais privé du goût du pain. Il faut que j’entre, me dis-je, et que j’entende ce que l’on va se raconter ! Jouant d’audace, j’ouvris la porte de l’auberge et je me glissai dans la grande salle, aussi silencieusement que la couleuvre. J’y étais à peine que l’ouïe si fine du peau-rouge saisit ma présence, et il eut une crise.

« Lors de ma visite à l’auberge, j’avais observé la disposition des pièces, et je me jetai comme un trait dans une autre chambre, où l’on n’eut pas l’idée de regarder. Peu après, j’écoutais, parler le Mandane, qui dévoilait son secret à deux jeunes gens… et sais-tu qui ?

— Comment veux-tu que je le sache ?

— C’est vrai. Eh bien ! c’était messieurs de la Vérendrye et de Noyelles.

— Est-ce vrai ?

— Paraît que le Bison avait une amulette représentant un aigle noir, et que, dans cette image, était le secret.

— Ça se complique. Il devient plus difficile maintenant de mettre la main sur l’amulette.

— Peut-être que non, dit Brossard, mais ouvre grandes tes oreilles. Et c’est à partir d’ici que j’ai besoin de toi pour réussir.


VI

UNE SURPRISE


En route, Pierre demanda à Joseph s’il raconterait au juge tout ce qu’il savait concernant les confidences et le trépas du sauvage.

— Non, répondit Joseph. Le secret que m’a révélé le Bison m’appartient désormais, et je ne vois pas qu’il soit sage d’en parler. Il y en a trop qui voudraient en profiter.

— En effet, c’est bien ce que je pense. Mais, il me vient une idée : c’est qu’il serait plus prudent de prendre le contenu de l’amulette et le laisser chez moi, n’emportant que le talisman chez monsieur le juge.

— Très bien ! Pour nous rendre chez ce monsieur, nous passons à ta porte, et cela ne nous retardera guère d’entrer pour nous conformer à ton désir.

— Qui peut avoir donné nos noms au juge inquisiteur ? demanda Pierre.

— Oh ! probablement l’aubergiste.

— En effet, je n’y pensais pas.

Déjà la nouvelle du meurtre se répandait dans la ville, et les deux gentilshommes entendaient sur leur route divers groupes commentant