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pas se laisser prendre aux apparences et opposer un individu à une famille, mais bien famille à famille. Or, il arrive souvent que les guitti sont des jeunes gens, ou quelques membres d’une famille de petits paysans propriétaires de la montagne ; ils sont venus chercher dans l’Agro romano seulement un supplément de ressources. Les familles de colons au contraire ont émigré au complet parce qu’elles ne possèdent rien dans leur pays ; elles viennent chercher dans la Campagne romaine tous leurs moyens d’existence. Nous avons vu que Canterano fournit surtout des émigrants du premier type, parce qu’il y a une certaine aisance dans la commune, tandis que Rocca Canterano, dont les habitants sont plus pauvres, envoie surtout des émigrants du second type. À Monte San Giovanni les familles de journaliers prolétaires viennent cultiver en colonage les terrains de l’Agro ou des Marais Pontins, tandis que les familles de colons envoient seulement quelques-uns de leurs membres.

Au point de vue des résultats, il y a une grande différence entre l’émigration d’ouvriers isolés et l’émigration de familles entières Les familles qui envoient des émigrants se maintiennent, prospèrent même et peuvent quelquefois s’élever ; les familles qui émigrent tout entières restent misérables et si elles ne déchoient pas, c’est que toute déchéance leur est impossible. Les émigrants isolés ont, en effet, un but bien précis : compléter les ressources de la famille, lui permettre d’acquitter ses impôts, d’éteindre une dette, de réparer la maison ou d’acheter un champ ; ils