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les donner en emphytéose et même les vendre. La théorie ne cadre donc pas ici avec les faits. Si le droit de vivre est absolu, les moyens de vivre sont variés à l’infini, suivant les lieux et les temps ; vouloir les maintenir immuables, c’est condamner l’humanité à ne faire aucun progrès, c’est nier l’évolution des sociétés.

La question des usi civici a été étudiée surtout par des légistes qui se placent au point de vue uniquement juridique et cherchent à édifier des théories et à formuler des principes. C’est de là que vient tout le mal ; on aboutit alors à une intransigeance inacceptable. Prétendre que les usages publics sont imprescriptibles et inaliénables, c’est croire un peu trop à la vertu des mots. La prescription semble au contraire être une des grandes lois de l’humanité ; elle est à la fois une conséquence et une condition de l’évolution sociale ; et une chose ne reste inaliénable que tant que son propriétaire est assez puissant pour la conserver. Prétendre ne reconnaître que les usages publics basés sur un titre ou sur une jouissance incontestée, immémoriale et toujours identique à elle-même dans son étendue et ses caractères, c’est oublier que la terre doit nourrir tous les hommes, que le degré d’appropriation du sol dépend de la nature et de l’intensité de la culture et que l’exercice des usages publics, comme du droit de propriété lui-même, est parfois soumis à des influences passagères qui peuvent, momentanément, le dénaturer ou le supprimer.

Il est hors de doute que les usages publics dans la province de Rome ont subi de nombreuses