surtout combien sont-ils ? Du reste, ils ont comme moi leurs intérêts et leurs passions. Ils n’ont pas la soif de l’or, mais ils ont celle des honneurs et de la gloire, et c’est pour satisfaire leurs ambitions qu’ils travaillent. Leurs intérêts sont différents des nôtres, voilà tout.
Et l’intérêt de la France est-il bien de garder cette colonie au prix de sa fortune, et de son sang ?
Non, elle coûte trop cher, et elle est trop loin. Il y a trop longtemps que ce sol stérile est arrosé du sang de nos soldats. S’il est vrai que j’ai hâté sa perte, comme Vaudreuil m’en accuse, je m’en réjouis. J’ai rendu service à la France.
Prévoir la ruine publique, et la transformer en fortune privée, c’est de la sagesse et de l’habileté. Pourquoi n’aurions-nous pas vidé la maison quand nous savions que le canon ennemi allait y mettre le feu.
Mais n’avez-vous aucune inquiétude sur le sort qui vous attend dans la mère-patrie ?
Aucune. Je ne crains ni Vaudreuil, ni Lévis. Ils sont impuissants contre moi à la Cour. Le roi, lui-même, ne me fait pas peur. Il est trop absorbé par ses amours pour se préoccuper de mes affaires. Mes plaisirs ne troublent pas les